Les dernières réécritures sont toujours mes préférées. Après les dix ou douze relectures corrigées où tout bouge encore énormément, le texte est enfin là, sur le point d’être consommable, pas encore tout à fait à point, et l’on va chercher les dernières cuillères de jus bien au fond de la marmite pour le laisser couler sur le plat qu’on espère doré et appétissant.

C’est l’ultime relecture où l’on change un « de » pour un « à », et ce « à » pour un « de » avant de finalement opter pour le « à », où l’on met une virgule puis on l’enlève, puis on la remet, puis on finit par se dire que ça ne change rien, après tout. Quand on n’en est là, à chipoter pour une virgule, un point-virgule, un adverbe, on le sait, on a atteint ses limites personnelles, on puise dans ses réserves, on ne poussera pas le texte beaucoup plus loin.

C’est aussi le temps des dernières petites embûches orthographiques — et dieu sait qu’il y en a en français ! —, des petites frustrations aussi, tous ces paragraphes qu’on n’arrive toujours pas à faire chanter, qui n’ont pas encore l’envol ou simplement la tournure qu’on aurait voulu qu’ils aient. Il faut se faire une raison : il faudra s’en contenter pour le moment. Et se dire qu’on fera mieux la prochaine fois.

Tout n’est pas fini, bien sûr, on le sait. Le texte va encore bouger, notamment au cours de la correction orthographique déjà en cours mais pas encore terminée (je vous le demande : que fait Marion !?! :-)), également au cours de sa mise en page et, surtout, après avoir reçu les dernières notes de l’exigeante éditrice, Hélène Grosso, qui je le sais ne me passera rien.

Mais enfin, le gros du travail s’achève pour moi, le blé est coupé, il est temps de remettre le bébé, de le confier à d’autres bras qui vont lui donner sa forme définitive. De mon côté, je ne peux qu’essayer de rendre l’attente plus supportable en me lançant à corps perdu dans l’écriture du prochain roman déjà bien amorcé : le premier épisode « D’amour fol » de la série romanesque « Passé sous silence » [Finalement, le roman s’intitulera « Un amour fou ». NdR].